[La femme]
Oh Jeff, arrête de soupirer !
- Oui, foïl.
- Quel est le programme musical à la radio ?
- Au programme : La Prière d'une vierge, les Noces de Jeannette et l'Ouverture de la Dame blanche.
- Vraiment ça ne me dit rien du tout.
- Pfff, Ã moi non plus.
- Oh ! Et c'est tout ce que tu trouves à me dire ! A neuf heures du soir !
- Si on allait se coucher ?
- Oh oui, pourquoi faire ?
- Pour dormir, tiens !
- Dormir ! Dormir ! Et dire que tes idées infusent de la cité ardente, tu es toujours fatigué, toi !
- Bon-bon-bon, ça va. Je continuerai à lire ma gazette.
- Lire ta gazette ! Lire sa gazette ! Et moi, hein ! Moi !
- Toi, tu continueras à râler comme d'habitude !
- Sans raison peut-être ! Monsieur refuse de remplir ses devoirs conjugaux.
- Je ne refuse pas.
- Oh non tu ne refuses pas, non ! Tu veux et tu ne peux pas. Mais depuis deux mois, comme sœur Anne, je ne vois rien venir. Il est vrai que nous vivons dans une société de consommation.
- Et je ne consomme plus, je sais bien. Mais si tu savais pourquoi.
- Enfin ! Être chômeur, ça ne demande pas d'effort physique que je sache. Evidemment il faut pointer.
- Ah c'est bon ainsi ! Tu viens encore jouer sur les mots.
- Oh mais je ne joue sur rien. Mais vous, vous ne jouez plus avec rien !
- Jandon, Sylvie. Prends patience.
- Toi, toi, tu en aimes une autre.
- Comment peux-tu dire une affaire pareille, donc ! Sylvie, je te jure que…
- Ne suis-je pas jolie, jeune ? J'ai vingt ans. Quand je pense que Victor à quatre-vingt-deux ans trousse cinq à six femmes par jour.
- Victor ? Qui est-ce donc ça, Victor ? C'est votre papa ?
- Mais non, idiot ! C'est Victor Hugo !
- Et comment, Sylvie. Sylvie, moi je préfère tout te dire, parce que j'ai horreur de cette atmosphère tendue !
- Tendue ! Tu as de ces mots subjectifs !
- Oui. Enfin écoute, écoute-moi bien, mon histoire sera brève.
- Disons courte.
- Oui les deux pour le moment, voilà . Voilà Sylvie, moi je suis une victime de la mode maxi.
- Quoi ! C'est la mode des jupes longues qui…
- Oui oui oui, c'est le maxi !
- Evidemment, pour l'instant, avec vous, ce n'est pas mini.
- Non, c'est… c'est même minus, ça je l'avoue
- Mais enfin explique-toi.
-Avant, au temps de la belle époque, de la merveilleuse époque mini, c'était évocateur, c'était sensuel, on était tout de suite dans l'ambiance. Tiens, tiens, l'été, je flânais devant les terrasses, je regardais les femmes aux jambes croisées. Râh, quel spectacle ! Il n'y avait pas besoin d'aller au cinéma, ça nous autres. Et alors quand je voyais une femme au volant, et bien hop !, je piquais à l'intérieur et je découvrais ses cuisses.
- Mais, mais, bref. Mais tu étais un peu voyeur !
- Un peu beaucoup.
- La femme ouvrait la portière de son auto, tu t'arrêtais et tu voyais tout. Tout ça sans bourse délier !
- Sans ? Oui. Enfin laisse-moi continuer. J'ai été, comme qui dirait, un spéléologue à la découverte d'une grotte, l'homme du désert interrogeant le sable blond pour y chercher l'oasis, le pionnier qui enfonce…
- Qui enfonce ! Oui mais maintenant vous n'enfoncez plus rien du tout.
- Sylvie, ma p'tite Sylvie, je t'aime. Mais si la mode mini me faisait relever la tête, la mode maxi…
- Oui, te fait baisser le nez ! Mais pour le moment, je ne suis pas en maxi, que je sache. Mon baby doll devrait ainsi se faire plaisir.
- Oui mais peut-on faire les quatre cents coups quand on n'y est pas préparé ?
- Mais 400 ! 400 ! Je ne te demande pas autant !
- Sylvie, mon amour, crois-moi, laisse-moi le temps de m'habituer à cette laideur et tout reconnaîtra comme avant !
- Oh soit, mon chéri. Regardons la télévision.
- Ah c'est une bonne idée, ça ! Qu'est-ce qui est au programme ?
- L'Amour à cheval !
- L'Amour à cheval ? Oui, ça doit être difficile. Dis-moi, hé, qui est-ce qui joue dans ce film ?
- Spaak !
- Qui ?
- Catherine Spaak. Qu'est-ce que tu avais encore pensé !
- Ohohoh. Je me disais aussi. A son âge ! Et à cheval ! Ohohoh
Transcripteur : Dam-Dam |
Les paroles : [Merci]
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